La Route blanche relie Kegaska à Blanc Sablon sur une distance de 471 km. Celle-ci est composée de neige et de glace et, à la différence des autres routes du Québec, il peut donc être complexe de déterminer la vitesse à laquelle un ou une cycliste peut espérer la parcourir.

Vélo-Québec (1992) rapporte que les cyclistes circulent entre 20 et 30 km/h sur une surface plane et pavée, en l’absence de vent. De manière conservatrice, on peut donc déterminer qu’il faudrait 5 heures pour parcourir 100 kilomètres, sans tenir compte d’arrêts potentiels. Sur des sentiers techniques, cette vitesse peut toutefois être réduite significativement. En supposant une vitesse de 10 km/h, par exemple, on doublerait le temps de parcours. Dans de telles conditions, plutôt que de passer 10 heures en selle, il convient de réduire la distance parcourue journalièrement.

La boue, le sable lâche, la neige et les côtes, sans s’y limiter, peuvent ralentir significativement les cyclistes, jusqu’à les arrêter complètement. Lorsque la vitesse s’approche de 0 km/h, à vélo, il devient progressivement plus difficile de conserver son équilibre et il peut être préférable ou nécessaire de marcher en poussant sa bicyclette.

Col de Cougar Point, Colombie-Britannique – Photo par Félix-Antoine Tremblay

Holman (2010) cite l’alpiniste écossais Naismith (1892) en établissant la vitesse de marche à 5 km/h sur une surface plane et l’impact du relief à un ajout de 10 minutes par tranche de 100 m d’ascension. Cette vitesse peut être modifiée par le niveau de forme physique ou par une surface accidentée.

Si la surface est enneigée, il est préférable d’utiliser des raquettes à neige, par exemple. Or, la compacité de la neige a un impact important sur la vitesse de marche. Heureusement, malgré les risques d’accumulation de neige au cours de l’expédition, la Route blanche est compactée fréquemment par les motoneiges, et ce, sur une épaisseur significative, ce qui devrait garantir la portance minimale nécessaire à la pratique de ce sport.

La portance pose également problème aux vélos à pneus surdimensionnés. Bien que peu de données soient disponibles quant à la vitesse de marche de ce nouveau mode de déplacement, une Traversée du lac Saint-Jean à vélo est organisée chaque hiver depuis 2013 (Véloroute des Bleuets, 2019). Le tableau 1 rapporte les résultats de la compétition pour la catégorie « coureurs hommes », de 2015 à 2019.

Tableau 1 – Résultats de la Traversée du lac Saint-Jean à vélo

ÉditionDurée
moyenne
(hh:mm:ss)
Durée
médiane
(hh:mm:ss)
Vitesse
moyenne
(km/h)
Vitesse
médiane
(km/h)
2019 03:45:59 04:00:40 8,5 8,0
2018 01:51:08 01:44:18 17,3 18,4
2017 02:18:05 02:08:10 13,9 15,0
2016 04:06:16 04:03:44 7,8 7,9
2015 02:33:37 02:23:40 12,5 13,4
Moyenne 02:55:01 ND 12,0 ND

On remarque des écarts significatifs entre chaque édition. Ces écarts peuvent s’expliquer par la variation des conditions de neige ainsi que par les conditions météorologiques. La durée de parcours moyenne de 2016 est plus que le double de celle de 2018.

Avec une vitesse moyenne de 7,8 km/h, pour cette édition, on peut supposer que des coureurs ont été forcés de marcher à un moment ou à un autre, et ce, en utilisant des vélos non chargés. Il est donc impératif de prévoir des délais supplémentaires pour le transport des bicyclettes à la marche, de même qu’une méthode permettant de le faire efficacement. Afin d’être conservateur, on établit une vitesse de marche minimale de 5 km/h, laquelle ne tient pas compte d’événements exceptionnels pouvant forcer un arrêt prolongé.

Selon les données du Conseil national de recherches Canada (2019), le 15 février, à Tête-à-la-Baleine (50°42’ N, 59°19’ O), le soleil se lève à 6 h 10 et se couche à 16 h 14. Ce village est situé approximativement au centre géographique du trajet prévu et, à cette période de l’année, la durée du jour augmente. Conséquemment, il est conservateur de prévoir des journées de 10 heures. En considérant les pertes de temps, et pour éviter de rouler durant la nuit, on peut supposer 8 heures productives par jour.

Ski de fond et fatbike, Finlande – Photo par Juho Holmi, Flickr

La distance maximale entre deux villages est établie à 99 kilomètres. À une vitesse de 5 km/h, il faudrait 20 heures pour parcourir cette distance. Au rythme de 8 heures par jour, cela représente un peu moins de trois jours. En supposant des conditions météorologiques rendant la circulation impossible pendant une de ces journées, il vaut mieux en prévoir quatre. Il s’agit du niveau d’autonomie maximal à planifier entre chaque ravitaillement. Gérer ses ravitaillements postaux aborde cette question plus en détail.

Considérant qu’il est possible de parcourir 40 kilomètres par jour, à ce rythme, toute distance inférieure devrait pouvoir être réalisée en au plus une journée. En cas de mauvaises conditions, cette durée pourrait augmenter à deux jours. Pour les distances inférieures à 40 kilomètres, entre deux villages, c’est donc deux jours qui doivent être prévus. Pour les distances variant entre 40 et 80 kilomètres, cette durée est augmentée à trois jours, pour la même raison.

La section entre Natashquan et Kegaska, longue de 51 kilomètres, est maintenue à une journée, puisque la portance n’y représente pas une problématique. En effet, il s’agit d’une route permanente. Il en va de même pour le tronçon entre Chevery et Harrington Harbour, puisque la distance entre les deux villages n’est que de 16 kilomètres. Il est également à noter qu’aucun arrêt de longue durée n’est prévu à Mutton Bay, en raison de sa proximité avec La Tabatière, soit seulement 10 kilomètres.

Le tableau 2 présente les données concernant l’autonomie à prévoir, en fonction de la durée prévue à un rythme de 40 kilomètres par jour, en tenant compte des risques liés aux conditions routières et météorologiques.

Tableau 2 – Autonomie à prévoir

Point de
départ
Point
d’arrivée
Distance
(km)
Durée
prévue (j)
Autonomie
à prévoir (j)
Natashquan Kegaska 50,71 1
Kegaska La Romaine 57,62 3
La Romaine Chevery 99,43 4
Chevery Harrington
Harbour
16,11 1
Harrington
Harbour
Tête-à-la-
Baleine
33,41 2
Tête-à-la-
Baleine
La Tabatière 39,51 2
La Tabatière Saint-
Augustin
63,12 3
Saint-
Augustin
Vieux-Fort 88,13 4
Vieux-Fort Lourdes-
de-Blanc-
Sablon
74,12 3

En prévoyant d’emblée un arrêt d’une journée dans chaque communauté du tableau 2, cela porte la durée de la section principale de l’expédition à 30 jours. Ce calcul est plutôt pessimiste, puisqu’il suppose le délai maximal prévu au tableau 2 pour chaque portion de l’expédition. Le tableau 3 présente ce à quoi pourrait ressembler le calendrier de l’expédition.

Tableau 3 – Calendrier provisoire pessimiste

Point de départ Date de départ
(aaaa-mm-jj)
Point d’arrivée Date d’arrivée
(aaaa-mm-jj)
Natashquan 2020-02-15 Kegaska 2020-02-15
Kegaska 2020-02-17 La Romaine 2020-02-19
La Romaine 2020-02-21 Chevery 2020-02-24
Chevery 2020-02-26 Harrington
Harbour
2020-02-26
Harrington
Harbour
2020-02-28 Tête-à-la-Baleine 2020-02-29
Tête-à-la-Baleine 2020-03-02 La Tabatière 2020-03-03
La Tabatière 2020-03-05 Saint-Augustin 2020-03-07
Saint-Augustin 2020-03-09 Vieux-Fort 2020-03-12
Vieux-Fort 2020-03-14 Lourdes-de-
Blanc-Sablon
2020-03-16

Quant à lui, le tableau 4 présente une version optimiste de ce calendrier, soit en supposant que les délais prévus au tableau 2 sont tous respectés. Dans ce cas, la durée de l’expédition est réduite à 23 jours, dont 8 jours de congé dans huit communautés de la Basse-Côte-Nord. Le temps de parcours pour le trajet principal est donc évalué à 27 jours, soit la moyenne de ces deux projections.

Tableau 4 – Calendrier provisoire optimiste

Point de départ Date de départ
(aaaa-mm-jj)
Point d’arrivéeDate d’arrivée
(aaaa-mm-jj)
Natashquan 2020-02-15 Kegaska 2020-02-15
Kegaska 2020-02-17 La Romaine 2020-02-18
La Romaine 2020-02-20 Chevery 2020-02-22
Chevery 2020-02-24 Harrington
Harbour
2020-02-24
Harrington
Harbour
2020-02-26 Tête-à-la-Baleine 2020-02-26
Tête-à-la-Baleine 2020-02-28 La Tabatière 2020-02-28
La Tabatière 2020-03-01 Saint-Augustin 2020-03-02
Saint-Augustin 2020-03-04 Vieux-Fort 2020-03-06
Vieux-Fort 2020-03-08 Lourdes-de-
Blanc-Sablon
2020-03-09
Références

Holman, T. (2007). A Lake District Miscellany. Londres, Angleterre : Frances Lincoln Limited.
Vélo Québec (1992). Technical handbook of bikeway design. Montréal, Québec : Regroupement Loisir Québec.

Conseil national de recherches Canada (2019). Options avancées et directions du Soleil. Repéré à :
https://www.nrc-cnrc.gc.ca/fra/services/levers/avancees.html
Véloroute des bleuets (2019). Résultats. Repéré à : https://velosurlac.com/resultats